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Allemagne, 1983

Ce dimanche 23 février 2025, jour où je publie ces images d'archives, l'Allemagne renouvelle son parlement, donne 28% des voix au centre-droit et 20% à l'Alternative pour l'Allemagne, qui double son score tandis que les socialistes s'effondrent et que les Verts reculent fortement.

Ces résultats s'inscrivent dans une crise historique au sein de l'alliance atlantique. Une semaine plus tôt à Munich, le vice-président américain J.D. Vance a dénoncé le climat de censure antidémocratique qui, selon lui, règne en Europe. Joignant les actes à la parole, il a rencontré Alice Weidel, présidente du groupe AfD mais pas le chancelier Olaf Scholz.

Pendant ce temps, trois ans après l'invasion russe le président Donald Trump veut imposer à l'Ukraine une "paix" qui ressemble à une capitulation sans condition face aux exigences de Moscou. Les négociations en préparation excluent à la fois l'Ukraine et l'Union européenne. Les États-Unis voudraient écraser de leur mépris leurs ex-alliés qu'ils ne s'y prendraient pas autrement. Peut-être ont-ils raison. Après des années de tergiversations, les Européens réagissent entre désarroi et colère, de façon désunie comme toujours.

Est-ce "La défaite de l'Occident", titre du livre d'Emmanuel Todd paru en janvier 2024? Énumérant les surprises dont la guerre en Ukraine a accouché, Todd conclut: "Cette défaite est une certitude parce que l'Occident s'autodétruit plutôt qu'il n'est attaqué par la Russie." Un an plus tard, les faits semblent lui donner raison.

Mon propos ici n'est pas d'analyser ce moment historique mais de le rapprocher d'une autre crise que me rappellent des photographies que j'ai faites en 1983: celle dite des "euromissiles". Les relations est-ouest sont alors tendues, l'URSS déploie ses missiles SS-20 tandis que l'OTAN décide de déployer dans cinq pays européens de nouvelles armes nucléaires, notamment des Pershing II et BGM-109 G. De 1979 à 1985, d’importantes manifestations antinucléaires sont organisées contre l’installation des euromissiles, encouragées par l'Union Soviétique. Les plus importantes se déroulent en 1983 dans différentes villes allemandes et réunissent au total 1,3 million de personnes. Celle à laquelle j'ai assisté se déroulait, sauf erreur, à Bonn.

Les jeunes qui manifestent sur ces images ont aujourd'hui mon âge. Je me demande ce qu'ils pensent du fantastique renversement de situation en cours. Ont-ils voté AfD? Sont-ils satisfaits de voir l'OTAN se déficeler sous leurs yeux? Craignent-ils la guerre? Craignent-ils la paix des vaincus?

Ce qui frappe sur ces photos d'il y a 42 ans est l'atmosphère plutôt bon enfant qui régnait. La police n'étais pas encore équipée de tenues anti-émeutes, des évangélistes se mêlaient aux pacifistes, on discutait ferme entre générations mais les insultes ne fusaient pas sur les réseaux sociaux. Cela semble aujourd'hui un peu irréel.

© Jean-Claude Péclet

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