Au "Bon port"
Coupe de la 48è régate des vieux bateaux, La Tour-de-Peilz
"Le Neptune", 1904, chantier naval de Locum (Meillerie)
Chez les Helvètes, "régater" signifie, au sens figuré, tenir tête, être à la hauteur. C'est à cette définition que je songeais en observant au large de La Tour-de-Peilz un spectacle singulier. Tandis qu'une flotille de vénérables embarcations en bois s'ébranlait doucement sous une brise légère, un drôle de moustique leur tournait littéralement autour.
L' "hydrofoil", c'est le nom de l'engin, a été adapté au surf il y a une quinzaine d'années. Relié à la planche par un solide mât d'un demi-mètre, il ressemble à un mini-avion sous-marin dont les ailes fonctionnent selon le même principe: l'eau s'écoulant plus rapidement sur la partie supérieure, bombée, que sur l'inférieure, plate, il en résulte un phénomène de sous-pression au-dessus de l'aile et de surpression en-dessous, donc de portance. Pour que la planche avance, le surfeur doit lui imprimer un mouvement alternatif de bascule à l'avant et à l'arrière - évoquant la nage des dauphins - ce qui demande le sens de l'équilibre, une bonne condition physique et de l'entraînement.
Le gaillard filant à côté des bateaux possédait visiblement les trois. Sans parler du matériel. Un bon hydrofoil en alu ou carbone coûte plus de deux mille francs pour garantir résistance et poids plume. Choc des technologies: le XXIè siècle partage le lac avec de vénérables bateaux en bois vieux de soixante ans et plus. Donc lourds et beaucoup moins mobiles, mais tellement plus beaux!
En résumé: les bateaux d'antan ne régatent pas avec les surfs modernes sur le plan des performances (certains de ces derniers sont équipés, ô hérésie, de moteurs électriques...), mais pour l'esthétique, ils sont imbattables.
Hydrofoil
Régate du dimanche 27 juillet 2025 au large de La Tour-de-Peilz
La régate des vieux bateaux à La Tour-de-Peilz, 48ème du nom, est une des plus anciennes de Suisse, voire d'Europe. N'étant pas marin mais plutôt observateur des belles choses et des hommes, j'y ai promené mon appareil photo ce dimanche 27 juillet 2025. J'ai été ému par un vieux monsieur qui a ajouté un flotteur, "à la polynésienne", à son canoë. Tout cela amené sur le toit de la voiture depuis Genève, à monter, déplier et hisser la voile, sortir du port en poussant ou à la pagaie car, bien sûr, aucune aide motorisée n'est autorisée. Et attendre qu'un vent léger se lève. La plupart de ceux qui naviguent sur ces bateaux les ont restaurés eux-mêmes, à force de patience et d'huile de coude. C'est une histoire d'amour et cela se sent.
Ces régates ont un côté "vintage" pleinement assumé. Je l'ai adopté aussi pour certaines images, recherchant les tonalités, contrastes et grain d'anciens procédés de tirage. Une galerie de photos d'ambiance complète ce petit reportage.
"Le Neptune" au large de Vevey, à la façon des autochromes, procédé développé par les frères Lumière au début du XXè siècle
Croisement de voiles, traitement par Nik Color Efex
Le peintre Gustave Courbet, accusé d'avoir été un des "déboulonneurs" de la colonne Vendôme pendant la Commune de Paris, lfut enfermé six mois à Sainte-Pélagie et condamné à payer les frais de reconstruction. Trouvant l'air de Paris décidément irrespirable, il s’enfuit en Suisse et s'établit à La Tour-de-Peilz. Il y passa le quatre dernières années de sa vie, peignit maints paysages représentant le château de Chillon, les "géants" des gorges de Saillon. On dit qu'il se baignait tout nu dans le lac. Sa maison, la villa "Bon Port" existe toujours, elle est visible sur l'image oi-dessous, au milieu, avec sa galerie surmontée de deux volets verts.
Voiles latines sur le Léman (à gauche, la "Vaudoise". Originellement, ces bateaux transportaient des marchandises
Le spinnacker bleu
Galerie
La Tour-de-Peilz, 27 juillet 2025. Leica M11 + apo-Ultron 90mm. et apo-Summicron 35mm. Sony RX 100 VII